« Qui va nous gouverner : le capitalisme de la surveillance ou la démocratie ? » Mardi 19 novembre était marqué par un événement organisé par la CNIL et la CNCTR, explorant les enjeux de la surveillance à travers le thème « La surveillance dans tous ses états. Quelle éthique pour protéger nos libertés ? ». L’objectif était de faire le point sur l’état actuel de la surveillance en France et dans le monde, tout en interrogeant son évolution future.
Marie-Laure Denis, présidente de la CNIL, a souligné que nous avons évolué d’une « surveillance d’État » à une « société de la surveillance ». Auparavant, l’État était « le seul acteur capable de mobiliser des ressources financières, humaines et techniques à grande échelle pour ce type de surveillance ».
Aujourd’hui, la surveillance revêt plusieurs formes : elle inclut non seulement la surveillance d’État, mais aussi «la surveillance commerciale ou entre particuliers, orchestrée par une multitude d’acteurs — des “Little Brothers” ». Cette évolution découle de « l’économie des plateformes, des technologies intelligentes, et de la prolifération des écrans », selon la présidente de la CNIL.
Une Société Dépendante du Numérique
Lors de cet événement, des experts de renom, dont Shoshana Zuboff, professeure émérite à la Harvard Business School et autrice de L’âge du capitalisme de surveillance, ont été invités à partager leurs perspectives.
Intervention à distance de @shoshanazuboff,
sociologue et professeure émérite à la @HarvardHBS#CNIL_air2024 pic.twitter.com/hUW7dEGshB— CNIL (@CNIL) November 19, 2024
Zuboff a discuté du « capitalisme de surveillance ». Elle a expliqué que ce phénomène est né dans « une civilisation de l’information », avec une explosion du stockage numérique des données, passant de 1 % en 1986 à 100 % en 2013. Elle affirme que toute communication doit désormais passer par le numérique, et ceux qui ne s’y conforment pas sont « exclus de la société ».
L’Origine du Capitalisme de Surveillance
Selon Zuboff, le capitalisme de surveillance a émergé chez Google au début de l’ère Internet. Alors un moteur de recherche gratuit, Google cherchait à générer des profits. Dans les années 2000, Google a découvert que les « déchets de données » laissés par les utilisateurs pouvaient prédire leurs comportements futurs. Cette innovation a ouvert la voie à l’utilisation des données pour la publicité ciblée.
Le Secret du Succès de Google
Une fois ce modèle implanté, Google a vu ses profits exploser. Cependant, l’entreprise a réalisé que la transparence sur l’utilisation des données pourrait susciter la colère des utilisateurs et attirer l’attention des législateurs, d’où la mise en place d’une « stratégie cachée » pour garder ce processus discret.
Zuboff affirme que la collecte de données à l’insu des utilisateurs est « littéralement du vol ». Cependant, ce modèle a été adopté par l’ensemble du secteur technologique, transformant le capitalisme de surveillance en une norme économique.
Capitalisme de Surveillance : Une Influence Mondiale
Le modèle économique du capitalisme de surveillance, initié par Google, s’est répandu dans toute l’économie, y compris dans l’industrie automobile, où les capteurs et caméras des voitures modernes sont devenus des outils de surveillance mobile.
Des Effets Nocifs sur la Démocratie
Cette situation a eu des répercussions sur la démocratie, notamment en érodant la vie privée. Les données personnelles sont revendues des centaines de fois par jour, et la désinformation prospère dans un environnement où la communication est dominée par ces géants technologiques.
Vers une Révolution Réglementaire?
Malgré les tentatives de régulation, comme le RGPD en Europe, Zuboff estime que ces mesures légitiment en fait le capitalisme de surveillance. Elle suggère que l’abolition de ce modèle pourrait être nécessaire pour préserver la démocratie, comparant cette situation aux abolitions historiques de l’esclavage et du travail des enfants.
Internet : Une Prison Sans Barreaux
Zuboff conclut que l’Internet actuel est une « prison de la surveillance sans barreaux ni sortie ». Elle appelle à reconnaître les dangers du capitalisme de surveillance et à envisager son abolition pour protéger les valeurs démocratiques.
Note : L’intervention de Shoshana Zuboff a été traduite et diffusée en français durant l’événement.
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