Les escroqueries bancaires ont pris une tournure inquiétante. Victimes de faux coursiers, certains se demandent si leur banque peut les rembourser. Récemment, plusieurs décisions judiciaires ont été rendues, et les juges ont souvent statué en défaveur des victimes.
Depuis peu, des fraudeurs se présentent comme des coursiers. Sous prétexte d’une prétendue fraude sur vos comptes bancaires ou de la livraison d’une nouvelle carte bancaire, ils récupèrent votre carte et votre code secret directement à votre domicile. Avec ces informations, votre compte est vidé en un clin d’œil. Dans ces situations, la banque doit-elle indemniser un client qui a cru, de bonne foi, que le coursier était un envoyé légitime de sa banque et qui a été piégé par un scénario bien conçu ?
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Ces arnaques bancaires se déroulent souvent en trois étapes distinctes. Tout commence par une phase d’hameçonnage. Les victimes reçoivent des SMS les invitant à cliquer sur un lien pour récupérer un colis, mettre à jour leur carte vitale, renouveler leur Crit’Air ou régler une contravention. Ces messages permettent aux escrocs d’obtenir vos numéros de téléphone, vos données personnelles (nom, adresse, date de naissance) et parfois même des informations bancaires (nom de votre conseiller, numéro de carte, identifiants de connexion…). Ces données facilitent la manipulation en vous faisant croire que vous avez affaire à de véritables conseillers bancaires.
Protection des Victimes d’Arnaques Bancaires : Ce que disent les Lois
La deuxième phase implique un appel téléphonique où les escrocs cherchent à vous faire valider des opérations via une double authentification – combinant smartphone et mot de passe ou code – sous prétexte de stopper de faux prélèvements. Cette arnaque peut atteindre une troisième phase où l’on vous avertit qu’un coursier viendra récupérer votre carte compromise ou vous en livrer une nouvelle, ce qui est bien sûr un mensonge.
Sous la pression, la victime, croyant avoir affaire à sa banque, confie sa carte au coursier, qui en profite pour réclamer et souvent obtenir le code secret associé. Face à un scénario convaincant, la victime obtempère, persuadée d’avoir affaire à un professionnel envoyé par la banque. Avec toutes ces informations, les escrocs effectuent des achats ou réalisent des virements. Il est crucial de rappeler qu’aucune banque n’a besoin de votre carte bancaire et de votre code personnel pour bloquer des prélèvements frauduleux. Elle n’exige pas non plus que vous vous connectiez ou réalisiez une opération spécifique pour arrêter une tentative d’escroquerie.
Mais une fois le méfait accompli, que peut faire la victime qui a remis sa carte bancaire ? En France, la législation protège assez bien le consommateur contre les arnaques bancaires. La loi impose aux banques de rembourser, sur leurs propres fonds, leurs clients pour toute somme indûment prélevée sur leur compte. Peu importe si l’escroc ou les sommes volées ne sont jamais retrouvés. Cependant, il y a deux exceptions : si le client est complice de l’escroquerie, ou s’il a été « gravement négligent ». C’est à la banque de prouver ces deux éléments pour échapper à son obligation de remboursement.
Le Droit au Remboursement : Une Problématique Non Absolue
En octobre dernier, la Cour de cassation a rappelé que la victime d’un faux conseiller – dont l’appel affichait le numéro de la banque – devait bien se faire rembourser par son établissement bancaire. Mais est-ce le cas lorsque la personne remet sa carte bancaire à un faux coursier, sous prétexte de stopper des prélèvements frauduleux ou de renouveler plus rapidement sa carte ? Cela constitue-t-il une « négligence grave » permettant à la banque d’échapper à son obligation de remboursement ? Différents tribunaux ont récemment tranché cette question. « La négligence grave du client peut être une cause exonératoire de la responsabilité de la banque », nous a rappelé par courriel Maître Alexandre Archambault, avocat spécialiste du Numérique.
Dans un jugement du 18 février 2025, le tribunal judiciaire de Paris a estimé, à propos d’un couple victime d’une arnaque au faux conseiller bancaire, que le fait de remettre leurs cartes bancaires et les codes secrets associés, un vendredi soir entre 21 H et 22 H, était bien une grosse négligence. Résultat : pas d’obligation de remboursement de la banque. Le couple a perdu près de 13 712 euros.
Aucune Banque Ne Requiert Un Coursier Pour Récupérer Vos Cartes
Dans un autre jugement du 11 avril 2025 où une victime a aussi donné à un faux coursier sa carte bancaire personnelle et celle de son compte d’entreprise, avec les codes, la banque avance « un manque de discernement de Monsieur [J] qui n’a pas relevé les incohérences du fraudeur, à qui il a confié ses cartes bancaires par le biais d’un coursier alors que la banque ne se déplace pas au domicile de ses clients pour récupérer des cartes opposées et fabriquer plus rapidement des cartes bancaires ».
Le tribunal judiciaire de Paris a jugé en ce sens : « aucun prestataire de services de paiement ne diligente un coursier pour aller récupérer des cartes de paiement dans le contexte d’une opposition pour fraude supposée ou avérée ». Or, le client d’une banque est censé « prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses données de sécurité personnalisées. Le manquement à cette obligation fait obstacle au droit au remboursement des paiements non autorisés par utilisation frauduleuse de l’instrument ». Ici, le fait de donner carte et code secret à un faux coursier annule son droit à être remboursé par sa banque. Résultat, la victime ne sera pas dédommagée de ses 17 806 euros envolés…
Ces différents arrêts semblent donc indiquer que les victimes de faux coursiers, qui ont laissé leur carte bancaire et leur code secret, ne seront pas remboursées par leur banque. Gardez en tête qu’il ne fait jamais remettre sa carte bancaire à qui que ce soit, même lors de son renouvellement. Votre établissement bancaire vous demandera de détruire l’ancienne carte, mais pas de la récupérer. Notez que votre banque n’a jamais besoin du moindre code secret ou d’un mot de passe. Si vous avez été victime, faites opposition à votre carte bancaire, appelez votre banque, changez vos mots de passe, et portez plainte.
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